Libre de jouer
Célia Kersuzan
Depuis quelques années, nous assistons à l’amplification de nouvelles pratiques récréatives dans notre quotidien - que se soit des pratiques codifiées ou au contraire autonomes, déambulatoires, en passant par les pratiques ludo-sportives - celles-ci ont toutes un même but, se déconnecter, prendre de la distance sur nos habitudes anesthésique.
Ce projet, « Libre de jouer » est né du constat, que la prise en compte de ces nouvelles activités dans le milieu urbain reste inexistante ou du moins peut appropriée aux mouvements qu’elles convoquent.
En effet, j’ai pu observer - autour d’exemples concrets - que les espaces dédiés à ces pratiques exerçaient une certaine dépendance sur les usagers : mouvements contraints, réitération des actions, mécanisation des gestes.
Il s’agissait alors de remettre en question les formes de la ville, pour repenser la pratique du ludique dans cet espace, en laissant plus de liberté aux imaginaires. Penser la ville comme un lieu de partage, d’interaction, de rencontre et d’appropriation, et non plus comme un simple lieu de passage quelconque, tel que nous l’abordons aujourd’hui. Envisager la ville autour d’un univers, un langage commun générateur d’expériences, pour que celle-ci devienne un lieu privilégié où les interactions sociales sont bénéfiques au développement personnel.
Dès lors, je me suis intéressé aux marquages comme les jeux tracés au sol qui ornent les cours de récréation. Opération par laquelle nous marquons quelque chose, ils sont souvent générateurs d’univers et d’imaginations, un stimulant créatif. Le marquage peut être un moyen de sortir d’une routine quotidienne, en étant esthétiques et réflexives, rendant l’usager attentif et acteur de son expérience. Sans ornement futile, accompagné d’une simple craie, un pochoir, le marquage réalisé par les expérienceurs peut alors admettre une autre dimension, celui du langage corporel et émotionnel, spatial et spirituel. L’experienceur rentre dans un espace-temps où il n’est plus parfaitement lui-même, où celui que la société veut qu’il soit. Il s’accorde une manière d’être et de faire les choses auxquelles il ne donne pas accès dans la vie quotidienne.
Ainsi, j’aborde le marquage autour d’un langage graphique, par des signes simples qui reprennent les mouvements du corps : sauter, grimper, marcher, courir, etc...
À partir de ce langage graphique, l’idée, est de créer des parcours éphémères, qui s’effacent avec le temps, puis réapparaissent, sous d’autres signes, grâce aux usagers. Utiliser l’espace urbain, le mobilier urbain, pour créer des « parcours de jeux éphémères ». Passer en dessous, dessus, sauter par-dessus...